jeudi 31 octobre 2013

Digression : L'origan, Coty

    L’Origan et moi c’est une passion destructive...



    Mais tout d'abord tranchons net : il est question d’un extrait vintage, le drugstore étant fermé près de chez moi, la version actuelle me reste inaccessible…   
   Puis évitons l’hémorragie usuelle : L’Heure Bleue de Guerlain n’existe pas en ce jour de 1905, et n’existera pas avant 1912. Oublions donc ce cher Jacques et louons ce grandiose François…



    




   Chaque fois il jaillit de son flacon tel un génie de lampe magique, un tourbillon étourdissant possédant l’art du voyage dans le temps.
   Son ouverture est juste incroyable : saturée de lumière elle dessine pourtant déjà le corps poudré, emmitouflé de fourrures fauves, dense et palpitant.
   L’espace d’un instant c’est un givre aldéhydé marié d’oranges un peu amères, à peine paré d’anis, fouetté d’une coriandre verte et corsée, qui éclate autours d’un corps épais de fleurs, d’épices… Dans un recoin, une peau animale presque cuirée, à la limite du fantasme fumé attend…
   Là s’impose un ylang épais, nimbé d’une poudre grasse où l’accord cosmétique rose/violette s’entoure d’amande, d’héliotrope grisé. Au milieu le rythme relevé d’épices joue sur la muscade et la cannelle. L’œillet bien présent se fait pourtant presque tendre, les bois patinés oscillent entre sciure et cire… Une impression de cerises confites dans les aiguilles de pin prend place, une pincée de cèdre en guise de poivre exotique l’accompagne.
    Puis l’animalité sort de l’ombre. La fourrure parsemée de neige du départ s’est réchauffée, elle exhale, poudrée, poussiéreuse d’encens, grasse d’un sébum ambré et patiné d’une gomme au fruité rouge. Sous le pelage, le corps musqué, savonné de civette un peu acre, se dévoile de plus en plus à travers des vapeurs lourdes.

   C’est magnifique.  Bien qu'un peu brusque, son équilibre est fier, éclatant, parfait dans son allure.

   …Puis nous commençons à nous regarder de travers. Lui, s’ingéniant à rendre sa vanille de plus en présente, ignorant ma sensibilité pourtant fort bien placée. Moi, anticipant son prochain esclandre chez Ambre en stock…
   J’ai beau tenter de repenser à cette gousse palpitante d’encens qu’il me présentait fièrement à nos débuts, je ne vois plus qu’un macaron vanille trop lourd pour frémir.
   Pourtant, sous ce quotidien étouffant, une tendresse de vieille maîtresse persiste. Je reconnais en lui coumarine et benjoin attractifs, mais ces atours ont forcé le trait, il n'est plus pour moi. Il a changé, une autre l’aimera ainsi mieux que moi…
   Mais masochisme d’une vieille maîtresse, il arrive toujours un jour où j’y retourne, une de ces journées où je me dis « Putain ! C’était si bon… » . Une journée où je suis prête à voir mon estomac se nouer juste pour quelques heures de plaisir dans son odeur…

  

   Le couinement des violons s’éloignant enfin, il reste un parfum somptueux, richement vêtu, à la force évocatrice rare pour moi. C’est un univers de fête folle, au cœur de l’hiver, dans une salle de bal chauffée de champagne, de rires, de vêtements précieux, de visages fardés… Une époque riche où l’on expose une insouciance feinte, masquant une nostalgie terrible.

  Tout se fissure, et alors ? Dansons…



Photo : Thomas Jorion

 







samedi 26 octobre 2013

De blog en blog



Je vais vous livrer une recette exclusive, préparée avec dérision et amour.
Pour cela il vous faut :
De la Parfumista...
De la Perfume Addict...
De la Passionnée de Parfum...
N'hésitez pas à ajouter de la Névrosée du flacon. Ca coute un peu cher mais c'est toujours du plus bel effet.
Mélangez doucement avec de l'illustratrice qui parle anglais dans sa tête, de préférence déjà un peu folle, cela n'en sera que meilleur.


Laissez reposer le temps de quelques lignes un peu ennuyeuses, et cliquez...



     

      Le fait est : j’aime parler parfum.

      Au fil de l’histoire de Lys Epona j’ai d’ailleurs parfois digressé autour de certains dont je suis amoureuse ou simplement qui m’interpellent. Et, c’était couru d’avance, j’y ai pris goût.
     Mettre en mots ce que m’évoque les parfums, les odeurs, est un moment précieux pour moi. Comme se rejouer une musique les yeux fermés, tous sens ouverts et en revivre l’émotion. Se laisser envahir par la puissance du transport, tenter d’en saisir les nuances et livrer, entre fantasme et réalité, délicieusement biaisé par le cerveau, un morceau symbolique.

     Mais la philosophie de flacon c’est aussi au quotidien qu’elle se vit, entre petites choses ravissantes et foutues bourdes incongrues. Parce que parfois la musique on la met à fond, on beugle dessus en yaourt comme un diable de Tasmanie, on casse tout voire même trois pattes à un canard… Parfois aussi on ne se souvient pas des paroles, on sifflote à peine, on s’endort.

    Bref le parfum c’est aussi tout simple et léger.

    Alors voilà, grâce à mon amie qui a su illustrer les affres du périple de Lys Epona, j'ai attrappé un autre gout : celui des petites incursions dans l'univers de tous les jours.
    Elle aussi a dû y prendre goût puisqu’aujourd’hui je suis fébrile comme une puce sous Black Afgano pour vous présenter, sorti tout droit de nos petites expériences réelles ou rêvée, ce blog à deux têtes et deux langues, tout dévoué aux aléas de la vie parfumée :

 
 
 
 

                                                                                            
 




 

vendredi 4 octobre 2013

Dans un Chapeau...



 ... Il y a des petits bouts de papier griffonnés de jolis noms. Ils attendent sagement qu'une main innocente se présente et qu'elle en tire un.
   






Mais une main innocente est bien dure à trouver autour de moi.


   




   
  
    D'emblée je dois écarter la mienne, encore humide de parfum empestant divinement civette, costus, castoréum ou même simplement la douce base Animalis.  L'innocence n'est pas son registre, elle flirte plutôt avec les vieux Tabu ces temps ci...







   Mon ami qui n'entend rien au parfum et voit des poneys partout pourrait faire l'affaire.
   Je lui demande, il soupire, s'approche, main assouplie, doigts déliés, prêt à caresser chaque recoin de papier pour atteindre l'inconnu du chapeau...
   Mais l'œil trop malicieux il demande alors : " Je dois prendre lequel ? "... " Mais ça va pas la main ! C'est du hasard, un jeu, je ne veux rien, surprends moi "
    Il soupire, s'éloigne, la main dans la poche,  le chapeau sur la tête et atteint finalement la porte... Foutre diantre, voilà qui tombe à l'eau ! Avec un cou qui embaume Bandit j'aurais dû m'en douter...





   J'ai pensé ensuite à la main de la petite fille d'une amie, mais cette mini main s'est, un jour, rendue coupable, lors d'un élan trop enthousiaste, d'un renversement partiel de Tubéreuse Criminelle... Un comble pour le côté innocent, je ne lui fais plus confiance!



   

   Ensuite, suivant la piste des petits monstres sans cou, il y a mon neveu.







   Mais au moment de lui demander, sa main est en pleine discussion avec un pot de pâte à tartiner choco/pistache/noisette/amande/pignon/géranium, bio/équitable/locavore/humaniste, sans sucre/gras/gluten/conservateur/antibio... Un pot super pro mais, qui comme les autres, colle partout, des orteils aux oreilles, et rend la main inutilisable. Il a beau bouder, Chocolate Greedy près de moi, c'est impossible.

   




   Une main amie alors. Mais choisir parmi les amis c'est ouvrir la guerre : des mains se proclameront plus innocentes les unes que les d'autres, certaines seront occupées ce jour là précis, d'autres râleront si elles ne sont pas témoins, comme lors du mariage de tante Gudrune... Une main amie doit rester celle qui permet de sentir le parfum des Heures défiler sur une autre peau, pas celle qui tripote des papiers au fond d'un chapeau noir !


   


  

   

     Et bien décidément, force est de constater que je suis en manque d'innocence et donc élégance est d'offrir à chacun une goutte de la version test qu'il a choisie... Et sans vouloir égratigner ma bonté d'âme, vous avez tous choisi une version différente, ce qui est bien plus simple et totalement possible ainsi !!!







 Envoyez moi un mail à lys.epona@gmail.com , avec votre adresse et votre numéro de fiole. Une enveloppe partira alors au plus vite vers votre boîte à lettre (peut être pas si vite, mais elle partira ! ).