lundi 11 février 2013

Nez à Nez


    C‘est la première fois que je travaille sur un projet créatif avec une autre personne, cette sensation est curieuse, pleine de nouveautés, d’inconnues et de questions aussi : allons-nous nous entendre, nous comprendre ? Une idée à deux têtes, voilà un joli monstre de légende à venir !

    Je passe la porte et fais enfin connaissance avec une jolie jeune femme souriante et chaleureuse : Amélie Bourgeois.

Nous parlons un peu de nous et je découvre le parcours qui l'a mené aux odeurs : lors de ses études en cosmétologie le parfum était " le truc que tu rajoutes ", mais pour elle ce fut le trésor, l’essentiel qui fait vibrer, l’expression créative à affirmer. Elle a donc plongé corps et ame dans le jus et aujourd’hui c’est un nez indépendant qui a monté sa propre boite, Flair ( Bucéphale et Flair, une belle association déjà ! ), elle crée pour des marques mais aussi pour des particuliers avec des partitions sur mesure... Et je viens de remarquer qu’aujourd’hui elle portait Féminité du Bois. C’est peut être idiot mais si j’avais senti le dernier Lady Gaga, j’aurais sans doute eu un frisson d’angoisse !!!

    " Tu aimes ? " cette question fut la première et chacune l’avons posée à l’autre. C’était très important pour moi de savoir si le travail était en accord avec ses goûts, si elle trouvait l’histoire intéressante, si l’univers lui parlait... Amélie fait du cheval : l’odeur de la peau, du box, de la sellerie, oui ça lui parle !!!
    Flacons et touches prêts à être dégainés, Amélie me présente d’abord le panneau d’ambiance qu’elle a composé pour se fondre dans l’atmosphère : les images comme décor, sa porte d’entrée vers le parfum, sa vision à elle. C’est ainsi qu’elle travaille. Et ce que je vois me plaît. C’est très intéressant de découvrir ses mots traduits en images, dans ma tête ce ne sont pas les mêmes mais pourtant elles se répondent parfaitement, oui c’est ça aussi…


   Pour plonger au cœur du sujet, je lui résume d’abord mes impressions sur N°2 et N°3. Maintenant nous sommes prêtes à développer en temps réel, nez à nez…
    N°2 n’a droit qu’à trois minutes de gloire : menthe, fluo, fraise, trop floral, il touche surtout ce que je ne n’aime pas, ce que je ne veux pas. Mais cela aussi est une part importante : lorsque je dis " on oublie ", Amélie dit " pas moi, c’est utile pour la suite "
    N°3 vient et je pointe, pile là, la fameuse note mentholée commune aux deux versions, l’épine dans ce départ qui sans cela me plaît tant. Amélie hoche la tête  " oui je vois tout à fait, un ajustement à travailler… " . Là j’aimerais être dans sa tête : je peux entendre les cliquetis des engrenages se mettre en branle !     

    Nous suivons toute l’évolution du parfum, je la ponctue de " Ha là tu vois il y a un effet X qui me plaît mais la note Y dedans me chiffonne " et Amélie de répondre " En fait c’est Z qui donne le coté Y pas X " . J’apprends, j’apprends !!! Je souligne cet effet cave à cigare que j’adore, cette rugosité trop sèche qui manque de féminité, cette étrange rondeur de céréale tourbée, ce bouleau fumé et cuiré à point… De chaque élément senti je tente d’extraire mes sensations.
Thymus Vulgaris. Herbier du musée d'histoire naturelle suédois
   
   Puis finalement Amélie me montre une synthèse des notes : évidemment, avec des noms, c’est beaucoup plus simple de m’exprimer, et je tombe amoureuse de ce thym blanc que j'étais incapable de nommer, fusant, "terpénique", camphré... Entre les notes que j'avais perçues et celles totalement floues, je peux maintenant être plus précise et reconnaître les choses pour ce qu'elles sont. Comme un voile soulevé, tout devient limpide.
    Mais le fil technique s’épuise enfin dans ma tête et tout revient au fantasme : oui on peut forcer sur le coté pas sage, sale, rien ne me fait peur, du cheval suant au lys pourrissant, c’est délicieux !
    Les mots d’ordre au final : une bouffée narcotique pour en avoir plein le nez, la palpitation charnelle de la peau du cheval, le souvenir d’une étreinte pour l’apaisement des corps.

    Notre rencontre s’achève, j’ai appris de chaque minute et le curseur excitation/impatience ne cesse de monter…
    Et puis je me dis qu’une histoire de cheval par un nez qui monte, ça ne peut que marcher…

3 commentaires:

  1. Bonsoir lys.epona. Je suis attentivement ton blog depuis le début. Continue, c’est très bien et cela fleure bon en cette période de grisailles. Vivement le printemps qu’on profite enfin de tes trouvailles.
    Bon vent et bonne écriture.
    Marie 13 A très bientot.

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  2. OOOHH c'est passionnant et ça me fait revivre des choses ...mettre des images sur des mots, c'est exactement ça,
    un accord avec l'autre , mais pour moi c'était des motifs pour tissu. Merci pour l'histoire. Olympia

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    1. Oui, un mot, si précis soit-il aura toujours des representations différentes... Demander à 20 personnes de présenter un vert et il y aura 20 nuances différentes. Trouver la personne avec qui accorder sa nuance est un moment que j'adore... Que ce soit une evidence ou après de longs débats d'ailleurs!!!
      Là c'était comme une surprise qui donne un grand sourire.

      Les motifs pour tissus, tu sais que c'est un truc qui me fascine presque ça! Je n'ai pas un gramme de couleur sur moi, toute en uni, mais je peux me perdre dans l'admiration d'un sublime tissus, me demandant qui, comment, pourquoi !!!

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