Le charme des fleurs, la rondeur d’un fruit, le réconfort d’un chocolat chaud, la pétulance d’un agrume, la magnifique société hygiéniste en flacon, bourrée de muscs lessiviels car il faut au moins sentir le propre à défaut de l’être vraiment… Voici exactement où nous ne sommes pas avec ce parfum !
Il devient très rare de trouver dans la parfumerie actuelle des notes appelant plus le corps que la lessive, des notes flattant plus l’animal sexualisé que celles flattant l’animal socialisé. Lorsqu’elles sont présentées, elles se parent souvent de voiles séducteurs aux codes stéréotypés ou d’ambiances érotico estivales, mais plongent rarement la tête au cœur des fesses sans préliminaire !
Une marque qui recèle des choses parfois radicales et bien fichues! |
Découvrir Musk du Roy au bouchon fait monter le rose aux joues et allume dans l’œil une interrogation troublée. Si l’on n’est pas outré par le propos, on le découvre à la vaporisation et l’on est alors propulsé devant un postérieur royal totalement impudique et triomphant, une couronne de jasmin en guise de Prince Albert sur l’autre face.
Mais il n’est pas que ça…
Le départ annonce déjà la couleur en effet, on ne nous ment pas sur l’histoire qui va suivre avec lui. Pourtant au milieu de ce qui se rapproche le plus d’une civette, une lumière pétille de vert crissant, de jasmins encore jeunes, de roses tendres, à peine mouillé d’angélique piquante, amère et rugueuse. Si l’on se prépare à l’orgie, traverser pour s’y rendre le petit jardin en jetant des coups d’œil à travers les bosquets est alors charmant.
Puis très vite l’évolution du jasmin se radicalise, d’un vert légèrement aqueux il bascule vers son aspect indolique le plus poussé, de plus en plus ample, et la fleur prend une texture assez incroyable, dense et souple, très narcotique et toxique. La civette, très fécale au départ, commence à jouer avec des notes plus proches de la peau (enfin pas celle du front !) sans pour autant perdre de force, car arrive un autre ingrédient au fort potentiel : la cire ! Comme une patine qui se mêle à la peau, l’enveloppe, fait ressortir son odeur naturelle et en même temps l’imprègne de l’air trouble ambiant. Une cire animale, pas l’encaustique dont on frotte la maie détournée, mais bien celle, âpre et épicée, semblant suinter du cuir, de la peau…
Ce jeu dure longtemps et c’est divin. Civette, cire et indole jouent au fond de la gorge en ronronnant, organiques. Et même si un fantôme, un peu épais et plastique, de fleur d'oranger semble venir rôder lascivement, il y a aussi un souffle décomplexé, lumineux et floral qui allège l’idée de sale et de luxure.
D’ailleurs, doucement s’impose un bout de savon, un peu vieux, pas parfumé, un peu piquant, un savon que l’on avait totalement ignoré alors qu’il était là dès le départ. La fête s’éteint mais il reste des bouts d’odeur : sous lui on devine encore la peau, repue, toilettée vite fait, heureuse de ces moments singuliers.
Alors oui ce Musk du Roy est radical. Sa construction relève-t-elle d’une facture grossière ou bien simplement d’un réel parti pris sans concession ? La fesse crottée ou bien le corps torride ? Si je ne peux m’empêcher de sentir à plein nez la civette fécale et être fascinée, je suis tout autant subjuguée par ces fleurs voluptueuses et ce savon frais.
Musk du Roy est une liberté pleine de vie et non de vice.
je me sens imprégnée des effluves émanant de ta plume,
RépondreSupprimertrès belle narration évocatrice, merci du plaisir, à présent
on ne peut qu'attendre la suivante,
Antidote
Je vais tacher de ne pas trop me perdre en digression tout de meme, mais en ce moment j'ai envie de parler des parfums que je porte!
SupprimerCela me fait très plaisir de savoir que ces mots deploient un peu d'odeur ;-)
je voudrais capturer et t'envoyer toutes les senteurs qui envahissent mes narines, un méli mélo olfactif où se cotoient : jacinthes(violine), tulipes(rouge/jaune), jonquilles, narcisses, + ? sur tige haute avec clochettes orange, un véritable kaléidoscope aux effluves multiples, un plaisir de tous les sens, comme ce journal qui nous tient en haleine et nous ravit, belle plume
RépondreSupprimerla curiste
Merci beaucoup! Et narcisses, jacinthes je suis preneuse... Quel régal ces eclosions!
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