mardi 12 mars 2013

L'ombre d'un choix

Réunion des versions
     Cette fois ci une impatience un peu tendue m'accompagne je dois bien le reconnaître ! Je vais sentir trois nouvelles versions, et un peu comme une petite fille capricieuse je veux être emballée, comblée, avoir une évidence qui me saute aux narines...
     Lorsque je retrouve Amélie elle semble bien plus contente que la fois précédente, bon augure, et est, du coup, très loquace : j'apprends directement qu'elle a totalement revu le départ et viré mon thym adoré... Là mon immense sourire figé veut juste dire " mais kestafoutu bitch ! "...
     Elle a beau me donner le joli nom du remplaçant censé faire tout pareil mais en mieux, m'assurer qu'avec lui le départ sera purgé de sa note mentholée malvenue, je soupire sur feu mon thym. Puis lorsqu'elle m'annonce qu'elle a ajouté un élément pour plus de fluidité c'est le coup de grâce : j'imagine une chose lisse et je tremble ! Mais j'empoigne vaillamment 9, 10 et 11, fait taire tout à priori, et me lance à la découverte de ces nouveaux opus.

    Mon histoire avec le thym vole immédiatement en éclat devant la précision et la justesse de l'ouverture. Elle est comme elle doit être, sans menthol, un poil moins fusante et plus sombre, mais toujours aussi explosive. Face à la fougue assurée et à la maîtrise de l’espace qui s’affiche à présent, le thym semble n’avoir été qu’un acteur mal dégrossi et arrogant, au registre unique et monocorde. Là c’est toute une palette qui crée l’unité… Et cela fonctionne avec chacune des versions : " whaou, merci angel ! "
    Versions que d’ailleurs je n’aborde pas comme d’habitude : si, bien sur, j’ai senti chacune d’elles dans leur ensemble, presque instantanément j’ai découpé tout et comparé par morceau, j’ai extrait les éléments et occulté le reste… Un peu comme un jeu des 7 différences ! Elles sont maintenant si similaires, juste les détails leur donnent leur personnalité.
      Et pourtant, malgré leur ressemblance les choses s’imposent. C’est marrant, une fois de plus il y a une version qui en une seule inspiration est évincée, jolie mais avec ce truc qui ne colle pas : n°10. Peut être trop de fleurs à lui reprocher tout simplement… Je n’y reviens pas, une fois suffit à savoir que ce n’est pas elle.

    Puis il y a le n°9 et le n°11…

-N°11 a une élégance très couture, il coule de source sans être lisse, accrochant peut être un ylang trop distinctif… Mais son réel défaut est son attitude étudiée, il semble un brin poseur. J’ai envie de lui décoiffer le chignon. Il est très réussi et superbement modelé, seulement il manque cette touche de liberté, cheveux et fesses au vent !

-N°9 a plus de clivages, il a arraché la traîne de sa robe haute couture pour mettre les pieds dans le ruisseau. Il a suivi toute la vie du lys, il a approché le naseau du cheval et traîné dans le box. Il n’est ni sage ni sale, il est sauvage. Il n’est pas cuir mais peau. Il n’est pas floral mais pourtant elles exhalent. Il y a des heurts, des hésitations, mais c’est comme une cadence à l’histoire. Et puis, comme pour chacune de ces versions, le labdanum est juste posé comme une touche de chaleur…


   Voilà, mon évidence est là. Je vais tergiverser, avoir peur de me tromper, me demander et si plus de ci, et si moins de ça, et si autre chose… Mais une des premières choses que j’ai apprise en art c’est de savoir m’arrêter lorsque cela me plait et non lorsque j’ai vidé tous les tubes sur la toile.
   Je repars avec trois fioles en poche, prête à les digérer, mais je sais déjà où je vais…

Illustration : Elodie Lahaye








8 commentaires:

  1. merci de nous inviter à partager votre périple,
    si joliment et judicieusement illustré,
    belle association de talents pour nous tenir en éveil,
    et nous donner l'envie d'avoir envie d'y revenir vite

    RépondreSupprimer
  2. le number nine !!! :-))

    RépondreSupprimer
  3. l'ombre d'un choix n'est plus l'ombre d'un doute, semblerait 'il ?
    l'impatience me gagne
    W.A

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Le doute n'a été qu'un murmure, je suis parfois butée et je n'ai ne l'ai pas écouté longtemps!

      Supprimer
    2. quand l'entêtement est positif, tout va bien

      Supprimer
  4. Bonsoir... Merci de nous faire partager cette folle aventure!!! C'est super, en plus bien écrit je trouve... Donc là vous allez aborder votre dernier rendez-vous pour le choix définitif? Et puis, pardonnez moi cette question un peu triviale mais qui doit intéresser peut-être des gens : combien coûte approximativement de se faire faire un parfum dans de telles conditions? J'imagine si c'est avec un nez professionnel ce doit être assez onéreux, non, tous ces essais successifs! En tout cas bravo et au plaisir de vous lire pour le résultat final! :)
    Sonia B.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Bonjour,
      Et oui le moment du choix définitif est bien arrivé tant l'évidence me saute au nez !!!
      Je ne pourrais vous dire combien une telle création coute : j'ai eu la chance de rencontrer des professionnels passionnés qui ont eu envie de porter ce projet, juste pour voir ce qui en sortirait, pour le plaisir de la création. On m'a simplement offert cette chance d'exprimer une histoire, une carte blanche olfactive à remplir selon mes désirs.
      Je sais simplement qu'entre les ateliers où, en 1h30, on vous fait un parfum pour 150€ (une abération soyons claire, ludique et agréable sans doute, mais rien de sérieux et complexe ne peut en sortir!) et les grandes maisons qui oeuvrent autour des 50.000€ il y a une marge!!!
      Amélie Bourgeois, la parfumeuse qui as fait ce jus, propose des formules sur mesure... Je ne lui ai jamais demandé les prix, je le ferai!!!
      Merci pour votre gentil mot Sonia, à bientot :-)

      Supprimer